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1765 et 1838 : les deux premiers théâtre
Les étudiants sont à l'origine des premières représentations théâtrales à Caen. Dès 1492, il est fait mention d'une farce : La Farce des pates ouintes contestant le pouvoir central, donnée sur le Pré-aux-Ébats (actuelle Place de la République), un espace idyllique du loisir décrit par Monsieur de Bras. Au XVIIe siècle, les représentations théâtrales ont lieu au Collège des Jésuites et dans les loges de la Foire de Pâques.
Le premier théâtre, la « Salle de la comédie », fut construit en 1765 pour le Sieur François Crescent de Bernault (entrepreneur de spectacles et directeur du Théâtre de Rouen), dans le champ de foire de la Ville de Caen, qui comptait alors 34 000 habitants. En 1773, la façade est transformée et la direction du théâtre est accordée à Mademoiselle Montansier, célèbre courtisane, déjà à la tête des Théâtres de Nantes et de Rouen. Cette salle de 600 places était située à l'emplacement de l'actuel Temple protestant et du parking de la rue Melingue, et devint après son abandon en 1838 Entrepôt des tabacs.
C'est le 28 avril 1838 que sera inauguré le Grand Théâtre de Caen conçu par l'architecte de la ville M. Guy. Derrière sa façade néoclassique, il offrait une salle à l'italienne de 1 000 places. Il brûlera, lors des bombardements des 15 et 16 juin 1944.

 

1945-1962 : « Le Tonneau »
À l'automne 1945, Édouard Colin, directeur de l'Office municipal de la jeunesse, engage un responsable des veillées et jeux dramatiques, Jo Tréhard, autodidacte de 23 ans. Dès juin 1947, il se préoccupe d'aménager un vrai lieu théâtral dans la ville en reconstruction. Ce sera  « Le Tonneau », officiellement « Salle municipale des Beaux-arts  » – grand baraquement militaire en tôle ondulée de type Rowney. L'architecte Lempereur y aménage une salle de 620 places dont le décor est confié à la peintre Yvonne Guégan. Charles Dullin dans L'Avare (1949), Gérard Philippe dans Le Cid (1951) et les concerts d'Édith Piaf, Yves Montand et Maurice Chevalier marquent les grandes heures de cette salle.

 

1955-1963 : la construction de l'actuel théâtre de Caen
En 1955, la municipalité d'Yves Guillou lance un concours d'architecture pour la reconstruction du théâtre de Caen dont le financement est assuré en partie par les dommages de guerre. En 1956, à l'issue de ce concours, la Ville de Caen opte pour le projet de l'architecte Alain Bourbonnais, mais refuse son projet de façade vitrée, et confie l'architecture extérieure à François Carpentier, avec le concours du scénographe Camille Demangeat.
Alain Bourbonnais (1925-1988) conçoit donc la salle et les espaces intérieurs du théâtre. La salle, avec ses deux balcons en demi-cercle, s'inspire et conserve l'esprit des « théâtres à l'italienne » dont elle reprend la forme en « fer à cheval », l'évolution des techniques de construction permettant dans cette configuration l'inclinaison du parterre et la suppression des colonnades au bord des balcons. À cette même époque, il réalise également le Théâtre du Millénaire à Luxembourg, et par la suite, la station « Nation »du réseau RER, l'église Stella-Matutina de Saint-Cloud et la Bibliothèque municipale d'Auxerre.
Le Théâtre est inauguré le 24 avril 1963, sous le nom de T.M.C. (Théâtre Maison de la Culture), et Jo Tréhard est nommé à sa direction. À son invitation, Antoine Vitez, alors comédien, y réalisera ses premières mises en scènes de 1964 à 1967. En 1968, Jo Tréhard quitte la direction du théâtre de Caen. Le théâtre traversera une longue période qui se terminera en 1989 où il n'aura ni directeur artistique général, ni projet culturel global.

 

1989 : un nouveau projet artistique pour le théâtre de Caen
En 1989, la Ville de Caen souhaite renforcer l'identité du théâtre qu'elle jugeait trop morcelée. Elle en confie la direction à François-Xavier Hauville, avec pour mission de rendre au théâtre un rôle phare dans la vie culturelle locale et régionale.
Dans cet esprit, une convention est passée en 1990 entre la Ville et le chef d'orchestre William Christie et son ensemble instrumental et vocal, Les Arts Florissants. Cette convention appuyée par un financement du Conseil Régional de Basse-Normandie permet une programmation musicale et l'accueil de productions lyriques de très haut niveau en collaboration avec l'Opéra de Paris, l'Opéra Comique, le Théâtre du Châtelet ou le Festival d'Aix-en-Provence. Partenaire privilégié du Centre Chorégraphique National de Caen/Basse-Normandie dirigé par Karine Saporta, le théâtre de Caen accueille et coproduit ses créations. Il met le théâtre à sa disposition pour les répétitions (cinquante à soixante jours par saison) et réalise dans ses ateliers la construction des décors. La Maîtrise de Caen, dirigée par Robert Weddle, et les Rencontres pour Lire de François de Cornière, implantées au théâtre de Caen, bénéficient de son soutien et de sa logistique pour y développer l'ensemble de leurs activités.
La réouverture du théâtre, en novembre 1991, à l'issue de sa rénovation, affirme un nouveau projet artistique et une nouvelle dynamique culturelle pour la Ville de Caen.

 

1991 : la rénovation du théâtre de Caen
Près de trente ans après son inauguration, le théâtre de Caen présentait des signes d'usure qui nécessitaient une réhabilitation intérieure, une rénovation des façades et une mise aux normes des installations électriques. Cette rénovation est confiée à Walter Zbinden, architecte franco-suisse, principal collaborateur de Renzo Piano et Richard Rogers lors de la conception du Centre Georges Pompidou et de l'IRCAM.
Dépouillement et luminosité vont guider son projet. Il choisit de décliner deux couleurs, le rouge et le gris, et va apporter quelques aménagements :
- L'entrée principale est élargie pour laisser entrer davantage la lumière naturelle. Le soir venu, un grand auvent en téflon, tendu vers l'extérieur, réfléchit une lumière artificielle pour créer un halo lumineux, conçu comme une invitation à entrer dans les halls ;
- Les halls sont réorganisés, et les espaces de service (billetterie et café) sont ouverts désormais sur l'esplanade. Ils peuvent ainsi fonctionner indépendamment du théâtre ; 
- Les foyers sont dépouillés de tout ce qui avait pu se greffer sur l'architecture et la décoration d'origine. Un plancher est installé dans le grand foyer, et des vélums fixés sur les murs de façades permettent de remodeler la lumière et l'acoustique en fonction des expositions ou des concerts qui y sont organisés ;
- La salle voit la mise en place d'un éclairage unique. Par un procédé de fibres optiques, plus de 1 060 points lumineux – autant que de fauteuils – constellent le plafond original (qui a été conservé et repeint dans une couleur sombre) et donnent l'illusion d'un ciel étoilé. Symboliquement, il s'agit de dire que chaque spectateur assis dans la salle a sa bonne étoile au dessus de sa tête.
Les fauteuils sont une création originale, spécialement dessinés pour le théâtre de Caen. Leur dos en bois permet de créer une surface de résonance acoustique plus favorable qu'une masse en tissu.
- Le rideau, rouge vif, renoue avec la tradition théâtrale ;
- Les murs et les sols sont retraités dans des nuances de rouge et de gris ;
- La façade, traitée en profondeur, a perdu son faux aspect de pierre de Caen au bénéfice du beige d'Étavaux, de la teinte des gravillons de la carrière d'Étavaux (près de Saint-André-sur-Orne). Cette nuance mêle le rouge et le gris de la décoration intérieure.

 

Le théâtre de Caen aujourd'hui
Le théâtre de Caen est le théâtre de la Ville de Caen dirigé depuis 2001 par Patrick Foll. Projet unique en France, il a pour originalité de proposer dans sa saison l’ensemble des genres du spectacle vivant. L'objectif étant de proposer une programmation pluridisciplinaire afin d'inviter le spectateur à la curiosité, à la découverte, lui faire goûter toute la richesse de la création contemporaine et questionner les passerelles possibles entre les différents genres. Tous les genres y sont présentés : opéra – le théâtre de Caen est l'unique scène lyrique de Basse-Normandie –, théâtre, danse, concerts, théâtre musical, ciné-concert, nouveau cirque, jazz et cultures du monde. Confiance et adhésion s'est emparé du public. La fréquentation du théâtre de Caen augmente un peu plus chaque saison et finit par doubler. Pour sa saison 2013/2014, il connait une importante phase de travaux. La plus importante depuis son inauguration .
2018 est l'année du chiffre record : près de 149.000 spectateurs ont fréquenté le théâtre de Caen !